9 – plus ou moins – brèves


Femmes voilées et voiles infemmes :

Je l’écris depuis des années sous bien des formes que je proposerai à nouveau sous peu. En attendant, voici cette pensée sous sa mouture la plus courte.

La chirurgie esthétique est un voile définitif.

Et celui-ci, allez savoir pourquoi…, n’émeut personne.

Une rime riche pour les quiches : 

Les français ont de quoi se réjouir puisque l’avenir de leur beau pays, souvent présenté sous les hospices les moins civiles, va être repris en mains et illuminé de la façon la plus radicale, version Corée du Nord puisque y’a d’la foi, par celui des candidats à l’élection présidentielle qui sera élu. Cela se confirme à se pencher sur la moindre des recettes magiques annoncées. Prenez Bruno Lemaire par exemple. Cuit mais pas trop, comme la baguette de pain travaillée par Richard Borhinger dans le film Diva où il est dit que le monde entier nous l’envie. Et bien le slogan des partisans de Bruno Lemaire lors des primaires de la droite, accrochez vous au pinceau, j’enlève l’échelle, le monde entier pourra s’en esbaudir, est :

« Les primaires

C’est Lemaire ! »

Pas de doute, l’avenir radieux et les lendemains qui chantent, c’est pour nous.

Voir la vidéo

Extrait BOF Diva, « Le zen dans l’art de la tartine » (Vladimir Cosma).  https://www.youtube.com/watch?v=Mk0QcCAcGh8

Alzheimer (2) :

La mémoire revient quand l’on se rend compte que la même oie revient.

Ciseaux dort (1/2) : 

Je ne vais pas chez mon coiffeur pour l’agilité des ses doigts ou sa capacité à retranscrire en acte au niveau de mes cheveux ce que je lui ai décrit à l’aide de mots simple et précis. Une vieille dame du quartier me disait d’ailleurs à son sujet avec un bel accent italien rocailleux, « Je ne sais pas pourquoi elles continuent à y aller (ses amies), à chaque fois il les scalpe ». Je confirme avoir mis des mois avant d’obtenir de lui qu’il n’utilise plus avec moi les ciseaux pour désépaissir. S’il était bûcheron la forêt amazonienne aurait intérêt à courir vite et surtout longtemps. Bref, si vous voulez le savoir, en réalité je vais chez lui pour l’écouter alors que vous l’aurez remarqué, normalement chez le coiffeur c’est l’inverse. La dernière fois que j’y suis allé, et quand je dis dernière c’est dernière, il me parlait de choses et d’autres, puis soudain il à baissé la voix, s’est penché vers mon oreille et m’a dit, du ton que l’on utilise dans les mauvais films pour proférer des propositions moralement condamnables, « Si tu veux je te fais un défrisage». J’ai d’abord pensé que c’était une image pour une proposition indécente, mais non. Juste un air de « personne n’y verra que du feu et si tu veux on pourra faire fi du passé – quel passé ? – et considérer dorénavant que tes cheveux ont toujours été lisses ». Depuis, je ne vais plus chez lui et l’on m’appelle Branduardi. Il aurait manifestement préféré Lalanne.

Ciseaux dort (2/2) : 

Et toujours lors de cette dernière coupe guillotinnière, florilège, il me tint à peu près ce langage. Après avoir commencé par une laborieuse mise en avant d’une connexion extrêmement lointaine et discutable d’un de ses amis et donc, par extension naturelle, de lui-même, avec Johnny Halliday, il me demanda, comme ça, à brûle pourpoint, la voix douce laissant augurer des mondes inconnus mais bien sûr meilleurs, « Tu connais le Gotha à Cannes ? Tu sais la discothèque… ». Non je ne connaissais pas le Gotha-à-Cannes, mais cela sonnait d’entrée, massivement, à mille lieues de ce qui a le charme de me faire frémir. Mais dans le mille de ce qui peut me faire rire. Je passe sur nombre de détails plus croustillants les uns que les autres à propos du Gotha-à-Cannes, pour en arriver à ce qui ponctua son panégyrique, une formule ouvrant les portes aux rêveries les plus rêvées, « En tous cas là-bas hein, attention, QUE DES CRÉATURES ! ». C’était donc ça, l’ultime message, le Gotha-à-Cannes, berceau du créationnisme.

Assaisonnés : 

Dans le métro Solal et Tim, 9 et 8 ans, me disent soudain, « Regarde papa les étincelles ! » Je leur réponds « Et encore ça n’est que la fin, au début ce sont des allumes-poivre.». Les deux frères, interdits une demi seconde, puis des étincelles dans les yeux.

Détumescence : 

Voilà des années, oui c’est possible, que je n’avais pas entendu la voix de Nicolas Sarkozy. Puis voilà que hier et aujourd’hui, coup sur coup, passent des extraits de deux de ses discours, à la radio, qui situent sa position en fonction d’un autre (le bien pensant) qu’il raille et dit ironiquement ne pas être, mais qui, d’évidence, doit tout de même nécessairement être défini, nommé, stigmatisé, moqué, posé, etc. afin que lui, N.S, soit. Un ton et une posture qui pointent des extrêmes, par lui honnis, pour mieux démontrer qu’il sait trancher. Au milieu et très fort, en bon médiocre. Mais un médiocre gonflé à l’hélium. Je pourrais ajouter, «comme les pommettes de sa femme le sont au Botox », mais la méchante comparaison risquerait de faire perdre de vue l’essentiel. A savoir que l’hélium, qui pourrait symboliser les croyances des peuples, n’anime-t-il pas le vent qui fait claquer les drapeaux et le souffle qui gonfle les poitrines patriotes ?, aurait peut-être ironisé Desproges, que l’hélium donc serait la solution au constat définitif du poète, « La bandaison papa ça n’se commande pas !». Hélium, du grec Hélios, soleil, ce gaz ayant été observé pour la première fois dans le spectre solaire. Le nom Viagra viendrait, lui, du mot sanskrit vyaaghra, qui désigne le tigre. Pas Clemenceau hein, non, non, Sarkozy Le bel Heliumal. Comme le Zeppelin LZ 129 Hindenburg.

Toi le frère que je n’ai jamais eu :

Alors que j’accompagnais quelques uns de mes jeunes élèves de Taï Chi et que nous parlions de la fête des mères, l’un d’entre eux, Léopold, malin et intéressé comme pas deux puisque lorgnant sur l’idée des cadeaux, me demanda, « Et pourquoi il n’y a pas une fête des frères ? ». Ce à quoi je répondis , « Il y en a une et elle s’appelle Fraternité ». La vieille dame qui marchait devant nous se retourna et dit « C’est merveilleux ». Mouais…

A la mode de chez nous : 

Il y a comme cela des mots ou des tournures de phrases qui s’inscrivent pour un temps comme étant incontournables. Pour dire les choses simplement, ils sont à la mode et l’on se serre autour d’eux pour se réchauffer et faire communautés, diverses et variées, à peu de frais. Par delà l’irritation épidermique qu’ils me procurent généralement, il en est qui me titillent jusqu’au sous cutané, et d’autres qui poussent jusqu’au céphalé. En voici quelques exemples récents dans la veine d’un dictionnaire des idées si ce n’est reçues en tous cas livrées.

– Un certain nombre de … :

C’est le « Il y a » de ceux auquel 4 lettres ne suffisent pas pour annoncer quoi que ce soit qui les suive et qui, quitte à se raccrocher à du chiffre, préfèrent que ce soit un nombre imaginaire voire indéfini. Un certain nombre de...ça fait plus peur, c’est mieux et le savoir reste du côté de ceux qui usent de cette expression. Énormément utilisée par les universitaires. Ex : Un certain nombre de paradigmes…

– Considérable :

Est au « cultivé » ce que le « C’est énorme » est au « beauf ». Infiniment utilisé, lui, par les invités de France Culture. Ex : Un certain nombre de paradigmes considérables…

– réel pour Réel* :

Le Graal a portée de bouche de quasiment tous les intervenants de France Culture, universitaires ou non. La réalité tellement bien perçue qu’on lui décerne une médaille en la nommant réel. Lapsus où s’entend tellement que le réel se voudrait Réel à la place du Réel. Le syndrome d’Iznogoud… Mais il ne suffit pas de baisser la tête devant le réel pour le grandir d’une majuscule. D’autant – plus, ou moins, – que le Réel est sans commune mesure.

– Mes collaborateurs :

Voilà un terme très prisé en entreprises par les professionnels, les vrais, les sérieux, qui en le réhabilitant et en le décrassant de sa connotation principe de réalité en temps de guerre, le ramène au niveau du principe de réalité en temps de paix. Net progrès puisque l’on passe ainsi de Au bon beurre** à Au bon beurre dans la raie***.

Profil type : Entreprise filiale d’une grosse boîte américaine (ou française mais alors le PDG à fait ses études en Anglo-Saxonnie). Le collaborateur habite dans le sud-est-est de la France mais travaille à Paris, roule en moto et a un temps – qui n’est plus celui des colonies, rien n’est parfait – été militaire. Il parle franc, droit dans les yeux, sa mâchoire est carrée et il collabore. Uniquement avec ses collaborateurs.

Réel : « Ein leerer Gegenstand ohne Begriff « (Un objet vide impossible à saisir par le concept – Kant). « …l’impossible c’est le Réel, tout simplement, le Réel pur, la définition du possible exigeant toujours une première symbolisation : si vous excluez cette symbolisation, elle vous apparaîtra beaucoup plus naturelle, cette formule de l’impossible, c’est le Réel. » (J.Lacan). Non récupérable par le symbole, par la lettre.

** Au bon beurre : Téléfilm de Edouard Molinaro (1981) d’après le roman de Jean Dutourd en 1952

*** Le dernier tango à Paris : Film de Bernardo Bertolucci (1972).